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Sahel, quels dialogues pour la solidarité ? Rencontre avec la malienne Aminata Dramane Traore

Fabrice Sprimont de la Direction de la coopération directe à WBI, Aminata Dramane Traoré, ancienne ministre de la Culture du Mali, Pierre Galand, personnalité du monde associatif et des mouvements de solidarité internationale (c) WBI
Fabrice Sprimont de la Direction de la coopération directe à WBI, Aminata Dramane Traoré, ancienne ministre de la Culture du Mali, Pierre Galand, personnalité du monde associatif et des mouvements de solidarité internationale (c) WBI

Dans le cadre de sa venue au Festival des Libertés, Wallonie-Bruxelles International et Bruxelles Laïque ont reçu Aminata Dramane Traoré, ancienne ministre de la Culture, figure intellectuelle du Mali.

Ancienne ministre de la Culture du Mali, cette intellectuelle connue pour son engagement pour la solidarité́ internationale et les enjeux liés aux déséquilibres Nord-Sud, reste un témoin privilégié des situations touchant les peuples d’Afrique de l’Ouest.
 
De nombreux étudiants en coopération de la Haute Ecole de la Province de Liège (HEPL) et de la Haute Ecole Libre Mosane (HELMo) ont assisté à ce dialogue entre Madame Traoré, Pierre Galand, premier secrétaire général d’Oxfam, ex-président du CNCD, ex-profeseur à l’ULB sur la coopération au développement, animé par la journaliste Bashi Wendy.

Quelles conditions pour de nouveaux modèles de coopérations ?

Ensemble, ils ont tenté d’imaginer d’autres perspectives et mécanismes de solidarités au-delà des crises et des guerres.
 
Dans son analyse, Madame Traoré a évoqué la place du discours occidental dans la coopération et la politique des pays du sud. Elle a ainsi souligné l’importance du « narratif », c’est-à-dire d’identifier qui, d’où et comment parle-t-on d’un pays ou de son peuple. Qui est à l’origine du discours, de la proposition d’aide au développement, de protection ou d’intervention ? Est-ce le pays lui-même ou l’occident ?
 
L’extrême dramatisation du regard porté par les occidentaux sur les pays du sud, leur permettent de légitimer, selon elle, les stratégies de soutien qu’ils vont développer sur place, sans concertation avec les premiers concernés. Elle a ainsi déclaré avec un humour malicieux « Ils noircissent le tableau au sens littéral comme imagé ».
 
Sans ignorer les situations complexes auxquelles sont confrontés des pays comme le Mali, elle a, appuyé par l’intervention de Pierre Galand, placé ainsi l’écoute et la sororité-fraternité au cœur de la coopération.

Ecoute et Sororité-fraternité

L’écoute des maliens, considérés chez nous encore, comme « le pays des sans-papiers » l’écoute des pays et des peuples avec leurs identités et leurs richesses propres. Souhaitant en finir avec des politiques de développement qui projettent une vision occidentale sur des pays en crise mais qui, finalement, ne créent ni emploi, ni richesse auprès des populations, ils ont chacun dénoncé également, l’économie de la guerre qui choisit ses conflits et ses investissements.
 
Selon eux, la solidarité passe par une sororité-fraternité inconditionnelle qui puise ses solutions au cœur du pays, de ses valeurs, ses savoirs, sa culture et menée par les citoyens des pays eux-mêmes.
 
Dénonçant les effets de la mondialisation qui proposent aux élites africaines, notamment une image de la femme et de la réussite sociale contrefaite, Aminata Dramane Traoré a martelé « Ne me libérez pas, je m’en charge moi-même, une domination en cache toujours une autre ». S’adressant indirectement aux pays concernés par les questions de coopération, elle a ainsi ajouté « soyez-vous-mêmes, puisez en vous, pour vous développer avec votre contexte ».
 
L’année dernière, Wallonie-Bruxelles International accompagnait la venue de Angela Davis au Festival des libertés. Celle-ci évoquait alors des combats prioritaires pour assurer un avenir à notre société comme la lutte contre le racisme et le décolonialisme. En rappelant l’intervention de cette figure du militantisme pour les droits humains, Pierre Galand a ajouté trois moteurs prioritaires pour le changement, trois soutiens essentiels selon lui.
 
Accompagner les paysans du monde porteurs de notre alimentation, les femmes qui développent et garantissent l’économie de base dans de nombreux pays, les migrants, en offrant à tous les peuples, le droit de se déplacer.
 
Créer de nouveaux modèles de coopération nécessite donc de penser, combattre, changer et selon Aminata Dramane Traore et Pierre Galand, nos meilleurs alliés sont le temps et la persévérance.
 
Retrouvez également l'article de Gabrielle Lefèvre au sujet de cette rencontre sur le blog entre les lignes.

Dernière mise à jour
26.10.2023 - 16:33
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