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Charles Kaisin: L’éloge de la folie

Dîner surréaliste à l'Hôtel de Ville de Bruxelles (c) MF.Plissart
Dîner surréaliste à l'Hôtel de Ville de Bruxelles (c) MF.Plissart

Charles Kaisin est un peu fou. De cette folie qui se rapproche du génie. De cette folie qui pousse à toutes les audaces et qui laisse s'épanouir une infinie créativité. Résultat ? Les Dîners surréalistes.

Scénographie, création d’objets et d’identités visuelles… Pour Charles Kaisin, tout projet professionnel s’apparente à une pratique poétique. Le designer aime citer Baudelaire et a fait des œuvres du poète français une source d’inspiration. De poésie, de fantaisie, d’images toniques et allégoriques, il a été question lors du Dîner surréaliste organisé le 20 avril dernier dans le bâtiment du garage Citroën, édifice bruxellois moderniste et emblématique situé au bord du Canal. Le thème de cette année était celui de la folie. « Madness, c’est une envie d’extravagance, d’inattendu, de folie des grandeurs, précise Charles Kaisin. Qu’est-ce qui est fou et qu’est-ce qui ne l’est pas ? Que peut-on considérer comme fou au regard des préjugés ? Il y a là également une lecture politique qui me tient à cœur. » Pour nous donner l’eau à la bouche avant ce Dîner, il nous parle du précédent. « Il s’était déroulé à l’Hôtel de Ville de Bruxelles. Je souhaite, lors de chaque Dîner, valoriser un bâtiment issu du patrimoine bruxellois. Les invités étaient des collectionneurs, des Directeurs de musée, des amateurs d’art égyptien, d’art conceptuel, d’Arte povera, d’art brut … Ils venaient des quatre coins du monde. L’an dernier, le Dîner s’est inspiré de « Correspondances », un sonnet de Baudelaire. C’est un vrai bal costumé, chaque invité doit respecter la règle. L’idée était de valoriser le thème du folklore, en rapport avec le texte de Baudelaire. Des marcheurs de l’entre Sambre et Meuse, le Royal Kituro - l’équipe de rugby qui a gagné le championnat de Belgique-, le Chœur de la radio flamande ou encore le Cor de chasse de Saint Hubert sont venus animer le repas." Des univers différents qui trouvent une cohérence dans une scénographie millimétrée. « Le repas est élaboré en lien avec le thème. L’an dernier, c’est le Chef David Martin qui en était le maître d’œuvre. Le dessert était proposé par Pierre Marcolini. » Ce même duo d’orfèvres a imaginé à nouveau le repas cette année. 
 

Combinaisons inattendues

Pourquoi surréaliste ? « Selon moi, le surréalisme, c’est Magritte, Achille Chavée, Marcel Broodthaers, Breton, De Chirico, Tim Burton, Ettore Scola, Stanley Kubrik, Max Ernst… autant de sources d'inspiration, précise Charles Kaisin. J’apprécie le style surréaliste mais j’aime surtout le fait d’établir un rapport à une autre réalité. Il s’agit également d’un enchaînement d’étonnements, de surprises. Comme lorsque l’on découvre l’ouvrage de Lewis Carroll et qu’on fait connaissance avec Alice et son pays des merveilles ». Une équipe de 15 à 20 personnes travaille à temps plein pour faire de ce Dîner un chef-d’œuvre. Tout est réfléchi, répété, régit, minuté. Il n’y a pas de hasard. Le soir venu, ce sont plus de 300 personnes qui jouent la partition sous la houlette du chef d’orchestre Kaisin : « Je sollicite mon entourage, ma famille est impliquée, il y a minimum un serveur pour deux convives, afin qu’il y ait une synchronisation parfaite du service et pour que l’expérience soit nouvelle, inattendue, agréable et positive. Ce Dîner, c’est un opéra où le spectateur n’est pas à la corbeille ou au balcon, il est sur scène. Par son costume, il devient pleinement acteur et profite d’une pléiade de petits événements singuliers qui viendront agrémenter son repas. » 
 

Sublimer l'artisanat

Lorsqu’il ne se concentre par sur l’organisation de ces Dîners, Charles Kaisin met notamment son talent au service de lieux à habiller et à animer. Il a décoré un tout nouvel hôtel situé dans la Médina de Marrakech.  « Ce travail a duré 4 ans. J’ai souhaité reprendre les codes marrakchi pour dessiner les quatorze suites de ce Riad. J’ai travaillé sur le thème de "L’invitation au voyage" de Baudelaire. J’ai profité du savoir-faire des artisans marocains, leur travail du cuir, du marbre, des zelliges… en lui donnant un souffle contemporain. C’est une rencontre entre cet artisanat et le design contemporain. J’ai par exemple recouvert un immense salon et un plafond vouté de 27.000 petits carrés de soie colorée, sortes de pixels. C’est un travail minutieux de recherches géométriques, qui m’a beaucoup plu ». Charles Kaisin aime la variété des projets et des expériences, s’il peut y faire preuve d’ingéniosité. Trouver des solutions originales, créer des objets, des décors et des événements dotés d’un fort caractère… cela aussi, c’est un peu un état d'esprit belge. 
 
Estelle Toscanucci
 
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Dernière mise à jour
03.05.2016 - 15:39
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